Le garde des Sceaux a présenté, le 9 décembre, à la Commission des lois de l'Assemblée nationale les amendements gouvernementaux au projet de loi relatif à la garde à vue, adopté avec modifications, le 15 décembre par la commission. Michel Mercier a rappelé que l'objectif central du projet de loi était l'assistance effective de l'avocat. Par ailleurs, la personne placée en garde à vue sera informée de son droit à conserver le silence. Concernant les régimes dérogatoires, « indispensables pour répondre à des circonstances exceptionnelles », « tout est affaire de proportionnalité ». Dès lors que peuvent être dûment motivées des circonstances particulières, « une dérogation est envisageable », a affirmé le ministre. La Cour de cassation a précisé dans trois arrêts du 19 octobre 2010, que des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'espèce » pouvaient justifier le report de l'assistance de l'avocat (Cass. crim., 19 oct. 2010 : JCP G 2010, 1104, Aperçu rapide par Haritini Matsopoulou. - V. aussi Cons. constit., 30 juill. 2010 : JCP G 2010, 914, Aperçu rapide par François Fournié ; JCP G 2010, 961, Aperçu rapide par Julien Boudon). Un amendement gouvernemental prévoit qu'en matière d'infractions à la législation sur les stupéfiants, de criminalité organisée et de terrorisme, la présence de l'avocat pourra être différée, sur autorisation du procureur de la République durant les 24 premières heures, et sur autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD) jusqu'à la 48e, voire jusqu'à la 72e heure en matière de trafic de stupéfiants et de terrorisme. En droit commun, la participation effective de l'avocat pourra être différée de 12 heures sur autorisation du procureur de la République, puis à nouveau de 12 heures sur décision du JLD. Dans tous les cas, ce report devra être motivé en fonction des circonstances de l'espèce. Le ministre est revenu sur l'arrêt Moulin de la Cour EDH du 23 novembre 2010 (JCP G 2010, 1206, par Frédéric Sudre), affirmant que la position de la Cour EDH n'était pas nouvelle. « Modifier le statut du parquet n'aurait aucune incidence puisqu'il resterait partie poursuivante, comme l'est d'ailleurs le juge d'instruction lorsqu'il rend une ordonnance de renvoi », a estimé le garde des Sceaux, selon lequel l'arrêt Moulin apporte deux précisions : la présentation à un juge est nécessaire, même si la privation de liberté intervient sur le fondement d'un mandat délivré par un autre juge et d'une garde à vue ; pour toute privation de liberté supérieure à 4 jours, l'intervention d'un magistrat du siège est nécessaire. Un amendement prévoit de confier le contrôle de la mise à exécution des mandats d'arrêt et d'amener au JLD. Parmi les autres amendements, il est prévu lors d'une confrontation entre un auteur présumé et sa victime, la possibilité que celle-ci soit assistée d'un avocat. Concernant la mise en oeuvre de la réforme, le garde des Sceaux a affirmé qu'il appartiendra à chaque barreau de s'organiser et à chacun des bâtonniers de mettre en place des permanences, avec un numéro dédié, de manière qu'un gardé à vue qui n'a pas d'avocat habituel puisse se faire assister. Un délai de carence sera fixé, « mais celui-ci ne doit pas intervenir chaque fois que l'audition est reprise, ce qui prolongerait inutilement la procédure ». Le texte sera examiné à partir du 17 janvier. La procédure accélérée ne sera pas mise en oeuvre.



Source : AN, Commission des lois, audition, 9 déc. 2010