Cass. 1e civ. 4 novembre 2010 n° 09-69.955 (n° 1013 F-PBI)

Pour déterminer si le délai de traitement d’une procédure pénale a été raisonnable, il faut partir du moment où le justiciable est accusé ; il peut s’agir de la date où il a été entendu comme témoin.

Un dirigeant social, qui avait été entendu comme témoin en 1993 dans une affaire d’abus de biens sociaux puis mis en examen en 1997 et relaxé en 2001, avait recherché la responsabilité de l’Etat pour dysfonctionnement du service public de la justice en faisant valoir que les délais de traitement de la procédure avaient été anormalement longs.

La Cour de cassation a considéré que le délai à prendre en compte avait commencé à courir en 1993, au moment où il avait été entendu par les services de police agissant sur commission rogatoire du juge d’instruction, et non en 1997, date à laquelle il avait été mis en examen.

En effet, même si le justiciable avait été entendu en qualité de témoin, il s’était trouvé dès cette date en situation de s’expliquer sur la portée des accusations dont il faisait l’objet, de sorte que l’accusation au sens de l’article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l’Homme résultait de cette audition qui avait eu une répercussion importante sur sa situation.

à noter

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue « dans un délai raisonnable » par un tribunal qui décidera du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (CESDH art. 6, § 1). Le caractère raisonnable ou non de la durée de la procédure dépend de la complexité de l’affaire, du comportement des requérants et de celui des autorités compétentes (pour une application, voir Cass. 1e civ. 20-2-2008 n° 06-20.384 : BRDA 5/08 inf. 26).

En matière pénale, c’est la date de l’accusation qui fait courir le délai. Après avoir rappelé que cette accusation se définit comme la notification officielle, émanant de l’autorité compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale (CEDH 10-12-1982, Corigliano c/ Italie), la Cour européenne des droits de l’Homme a récemment précisé que cette idée correspond aussi à la notion de « répercussions importantes sur la situation » du suspect (CEDH 11-2-2010 n° 24997/07, Malet c/ France). La Cour de cassation, en considérant que l’audition en tant que témoin d’une personne a une répercussion importante sur sa situation, se place dans le droit fil de cette jurisprudence européenne.

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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