Cass. soc. 26 octobre 2010 n° 09-65.565 (n° 2070 FS-PBR)

Le comité central d’entreprise des filiales d’une société cible d’une offre publique d’achat soumise au contrôle des concentrations peut, en qualité de partie à l’opération de concentration, se faire assister d’un expert-comptable chargé d’analyser le projet.

Lorsqu’une entreprise est partie à une opération de concentration de dimension nationale ou communautaire, l’employeur doit réunir le comité d’entreprise au plus tard dans un délai de trois jours à compter de la publication du communiqué relatif à la notification du projet de concentration ; au cours de cette réunion, le comité d’entreprise se prononce sur le recours à un expert-comptable ; le comité tient alors une seconde réunion afin d’entendre les résultats des travaux de l’expert (C. trav. art. L 2323-20).

La Cour de cassation vient de préciser que pour l’application de ce texte, combiné avec la réglementation communautaire des concentrations, sont parties à une opération de concentration l’ensemble des entités économiques affectées directement ou indirectement par la prise de contrôle.

Il s’ensuit que le comité central d’entreprise de sociétés françaises, filiales d’une société de droit néerlandais et formant une unité économique et sociale, est fondé à recourir à l’assistance d’un expert-comptable chargé d’analyser le projet d’offre publique d’achat formé contre la mère et notifié à la Commission européenne au titre du contrôle des concentrations. En effet, l’opération projetée a pour conséquence de supprimer l’un des acteurs du marché et a une incidence sur la situation des salariés des sociétés qui, indirectement, en sont la cible.

à noter

La notion de partie à l’opération est appréciée en fonction des définitions du droit communautaire et, en particulier, en considération du règlement européen 802/2004 qui détermine les conditions de mise en œuvre du règlement 139/2004 relatif au contrôle des opérations de concentration. L’article 1.6 de l’annexe 1 du règlement 802/2004 inclut parmi les « parties » toutes les entreprises appartenant au même groupe, qui se trouvent ainsi associées à la procédure de contrôle. Cette disposition a certes une finalité purement procédurale, mais elle peut permettre de comprendre que les parties ne sont pas uniquement les deux sociétés qui fusionnent mais aussi toutes celles qui se trouvent impliquées indirectement dans l’opération. C’est à partir de cet élément que la chambre sociale de la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir validé la mesure d’expertise-comptable. La solution est à notre avis la même en cas de contrôle national des concentrations.

La Cour suprême relève toutefois que l’opération avait une incidence sur la situation des salariés des sociétés indirectement impliquées. Le fait que la situation des salariés des filiales peut être affectée par la réalisation d’un tel projet justifie en effet que le comité d’entreprise soit réuni et puisse recourir à l’assistance d’un expert-comptable pour en mesurer toutes les conséquences. Pour autant, il n’est pas question de reconnaître le pouvoir de désigner un expert à tous les comités d’entreprises faisant partie d’un groupe impliqué dans une opération de concentration si cette opération est sans conséquence pour les salariés.

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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