CA Paris 22 septembre 2010 n° 08-14438, ch. 4-9, Selarl Avocats consultants associés pour le conseil et le contentieux immobilier et administratif et a. c/ Société nationale des chemins de fer français

L'avocat qui manque une audience à cause du retard de son train peut être indemnisé par la SNCF car celle-ci n'a pas respecté son obligation contractuelle de respecter les horaires.

Un avocat associé d'une Selarl située en région parisienne qui devait plaider à Nîmes avait acheté un billet de train au départ de Paris. Le train de banlieue qu'il avait emprunté pour rejoindre Paris avait eu une demi-heure de retard à la suite d'une anomalie d'aiguillage, si bien qu'il avait raté le train pour Nîmes. Poursuivie en indemnisation du préjudice subi par l'avocat, la SNCF avait fait valoir que la cause exclusive du dommage était la faute d'imprudence dans l'organisation de son voyage commise par l'avocat qui avait prévu un délai de 17 minutes seulement entre ses deux correspondances.

La cour d'appel de Paris a écarté cette argumentation et retenu la responsabilité de la SNCF pour les raisons suivantes :

  • la SNCF a l'obligation contractuelle d'amener les voyageurs à destination à l'horaire prévu et cet impératif de ponctualité, qui figure dans son cahier des charges, s'impose tant pour les trains de grande ligne que pour les trains de banlieue ;
  • le retard subi par le train de banlieue était important pour un trajet court (30 minutes) ;
  • le délai estimé entre les deux correspondances ne paraissait pas imprudent car l'arrivée et le départ des deux trains s'effectuaient dans la même gare.

Par suite, la SNCF a été condamnée à verser des dommages-intérêts à l'avocat (500 € au titre du préjudice moral pour l'inquiétude et l'énervement subi) ainsi qu'à la Selarl : 1 000 € au titre de la rémunération qui était convenue pour la plaidoirie et ne pouvait plus être réclamée au client ; 825 € pour le manque à gagner au titre du taux horaire ; 1 000 € au titre de la perte de crédibilité à l'égard d'un client.

à noter

La SNCF est tenue envers ses clients de respecter les horaires figurant sur ses panneaux d'affichage. La décision ci-dessus réaffirme que le respect de ces horaires constitue une obligation de résultat (CA Paris 4-10-1996 n° 95-5713 : RJDA 3/97 n° 355).

Celui sur qui pèse une obligation de résultat peut échapper à sa responsabilité s'il prouve que le dommage est dû à un événement de force majeure (C. civ. art. 1148). Au cas particulier, l'absence de force majeure ne faisait aucun doute puisque le retard du train était dû à une anomalie au niveau d'un aiguillage. La faute du contractant victime est également une cause d'exonération partielle ou totale de responsabilité du débiteur (Cass. com. 23-1-2007 n° 05-13.681 : RJDA 7/07 n° 773) selon qu'elle est ou non la cause exclusive du dommage (Cass. com. 1-3-2005 n° 03-19.470 : RJDA 12/05 n° 1315). Il résulte de la décision rapportée qu'un voyageur peut légitiment prévoir un délai de 17 minutes pour effectuer une correspondance dans une même gare lorsque le premier trajet est d'environ 30 minutes.

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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