Le père d’un enfant naturel, inscrit à la naissance comme né de père inconnu et confié par la mère à un couple qui refuse de lui remettre l’enfant malgré une décision lui en octroyant la garde, allègue que l’inaction et le manque de diligence des autorités portugaises, ainsi que la durée excessive de la procédure en vue de l’exécution de la décision de lui octroyer la garde de son enfant, portent atteinte aux articles 6 § 1 et 8 de la Convention.

D’emblée, la Cour décide de n’examiner l’affaire qu’à la lumière du seul article 8 de la Convention.

La Cour rappelle que, pour un parent et son enfant, être ensemble représente un élément fondamental de la vie familiale et que des mesures internes qui les en empêchent constituent une ingérence dans le droit protégé par l’article 8 de la Convention. La Cour rappelle que l’obligation des autorités nationales de prendre des mesures à cette fin n’est pas absolue car il arrive que la réunion d’un parent avec son enfant qui a vécu depuis un certain temps avec d’autres personnes ne puisse avoir lieu immédiatement, et requière des préparatifs afin de tenir compte des intérêts et des droits et libertés de ces mêmes personnes, et notamment des intérêts supérieurs de l’enfant et des droits que lui reconnaît l’article 8 de la Convention.

Il ne faut pas perdre de vue, par ailleurs, que dans les affaires touchant la vie familiale, le passage du temps peut avoir des conséquences irrémédiables sur les relations entre l’enfant et le parent qui ne vit pas avec lui.

En l’espèce, la Cour est consciente du caractère délicat de l’affaire litigieuse ainsi que des retombées médiatiques de celle-ci tout au long de la période considérable pendant laquelle la procédure s’est déroulée. Les autorités étaient en effet confrontées à une situation nouvelle, qui allait au-delà d’un conflit entre les parents biologiques eux-mêmes ou entre ceux-ci et l’État. Ceci ne les dispensait toutefois pas de déployer tous les efforts nécessaires à l’exécution de la décision d’octroi de la garde de l’enfant au requérant.

Et justement, tout en rappelant qu’il ne lui revient pas de substituer son appréciation à celle des autorités nationales compétentes quant aux mesures qui auraient dû être prises, car ces autorités sont en principe mieux placées pour procéder à une telle évaluation, et tout en reconnaissant qu’en l’espèce les juridictions internes se sont appliquées, à partir du 21 mars 2007 et malgré quelques vicissitudes – il a notamment fallu changer l’équipe de pédopsychiatres suivant l’enfant – , de bonne foi à préserver le bien-être de l’enfant, la Cour constate l’existence de manques de diligence graves dans la procédure.

La Cour constate que le requérant a subi un préjudice moral résultant de la violation, par les autorités nationales, du droit au respect de sa vie familiale. Elle lui octroie à ce titre 15000 euros.

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Sources :
Gazette du Palais
06/06/2012

Consulter :
CEDH, 22 mai 2012, n° 61173/08, aff. Santos Nunes c. Portugal