Le comité d'entreprise doit être informé et consulté sur toutes les modifications économiques et juridiques emportant des conséquences pour les salariés et pour l'organisation de l'entreprise, peu important que celles-ci soient la conséquence de dispositions légales.

La société Radio France Internationale décide en décembre 2008 d'informer et de consulter son comité d'entreprise à propos d'un projet global de modernisation qu'elle souhaite mettre en oeuvre, et qui aura pour conséquence la réorganisation de l'ensemble des services de l'entreprise et la suppression de 206 emplois. Ce projet de modernisation est rendu nécessaire notamment par l'adoption de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, qui prévoit que la société Audiovisuel extérieur de la France (AEF), précédemment créée en avril 2008 et détenue par l'État, se voit transférer l'ensemble des actions de RFI.

Le comité d'entreprise de RFI saisit le tribunal de grande instance, statuant en référé, afin de demander la suspension de la consultation en cours relative au projet de modernisation, au motif que l'employeur n'avait pas inclus dans ces débats la question du transfert des actifs de RFI vers AEF.

L'employeur avance deux arguments principaux à l'absence de consultation du comité à propos de ce transfert d'actifs : d'une part, ce rapprochement entre les deux sociétés avait été une conséquence de l'adoption de la loi du 5 mars 2009, et « l'employeur ne peut être contraint de consulter le comité d'entreprise sur le contenu et les conséquences d'une loi, qui ne donne lieu à aucun projet ni à aucune décision de sa part » ; d'autre part, le « contrat d'objectifs et de moyens », qui devait être signé au sein de la société AEF et qui définissait le cadre de l'absorption et ses conséquences sociales, n'était pas encore signé avait été arrêté dans son principe, mais insuffisamment avancé dans sa rédaction pour permettre à l'employeur de transmettre des éléments concrets au comité d'entreprise, et sa consultation s'avérait ainsi prématurée.

Le juge des référés, suivi par la Cour de cassation, donne cependant raison au comité d'entreprise. Ils jugent que « l'adoption de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 portant réforme de l'audiovisuel public et la négociation prochaine du contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre la société AEF et l'État emportaient des conséquences pour les salariés de la société RFI et étaient de nature à influer sur l'appréciation par le comité d'entreprise du projet global de modernisation mis en place au sein de la société RFI ». La cour d'appel « en a exactement déduit que le comité d'entreprise aurait dû être informé et consulté sur ces différentes modifications économiques et juridiques, peu important que celles-ci soient la conséquence de dispositions légales ».

Les deux juridictions vont même plus loin : il est fait « injonction à la société RFI de procéder sans délai à l'information et consultation du comité d'entreprise sur la mise en place d'AEF à son égard et sur la négociation par cette dernière de son contrat d'objectifs et de moyens pour ce qui la concerne, et en ordonnant jusqu'alors la suspension de la procédure d'information et consultation sur le plan de modernisation de la société RFI ». Le comité d'entreprise doit être consulté spécifiquement sur le rapprochement entre les deux sociétés, et cette consultation constitue un préalable aux autres débats relatifs à la réorganisation interne, qui sont, eux, suspendus.



Sources :

Cass. soc., 26 oct. 2010, n° 09-67.760, FS-P+B, Comité d’entreprise Radio France Internationale c/ Sté Radio France internationale : JurisData n° 2010-019502