Cass. 3e civ. 20 octobre 2010 n° 09-66.113 (n° 1254 FS-PB), Cie foncière et financière Morizet c/ Graff

Comme l’erreur obstacle, l’erreur de droit commise par un cocontractant emporte la nullité du contrat même si elle est inexcusable.

La loi du 31 décembre 1975 reconnaît aux locataires et occupants de bonne foi d’un local à usage d’habitation un droit de préemption en cas de vente après division de l’immeuble (art. 10-I).

Une société propriétaire d’un immeuble avait, à l’occasion de la mise en vente des logements composant cet immeuble, notifié par erreur une offre de vente à un locataire et à une personne qui était autorisée à occuper l’appartement en vertu du bail, offre que cette dernière avait acceptée.

La cour d’appel de Paris avait dit la vente au profit de l’occupant parfaite au motif que le vendeur, professionnel de l’immobilier, avait commis une erreur inexcusable en se méprenant sur l’existence d’un droit de préemption au profit du tiers occupant des lieux.

La Cour de cassation a censuré cette décision, jugeant au contraire que le caractère inexcusable de l’erreur de droit à l’origine de la notification du droit de préemption était sans incidence sur la validité de l’offre.

à noter

Il a déjà été jugé que n’est pas valable l’offre de vente faite par suite de la croyance erronée de l’existence d’un droit de préemption (Cass. 3e civ. 5-7-1995 n° 92-20.425 : Bull. civ. III n° 174 : Cass. 3e civ. 24-5-2000 n° 837 : RJDA 9-10/00 n° 828).

Au cas particulier, la cour d’appel avait bien reconnu l’existence d’une erreur de droit mais elle avait appliqué une jurisprudence établie n’admettant l’annulation pour erreur sur la substance (C. civ. art. 1110) qu’à la condition qu’elle soit excusable.

La Cour de cassation a récemment jugé que l’erreur sur l’objet de la vente, laquelle fait obstacle à la rencontre des consentements (erreur obstacle), doit entraîner l’annulation de la vente même si elle est inexcusable (Cass. 3e civ. 21-5-2008 n° 07-10.772 : Bull. civ. III n° 92). Elle retient la même solution pour l’erreur de droit. Il est vrai que, compte tenu de l’adage selon lequel « nul n’est censé ignorer la loi », il semble difficile de concevoir une erreur de droit excusable.

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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