Par Bruno Zabala, Avocat CMS Bureau Francis Lefebvre, Chargé d’enseignement à Paris I-Sorbonne Loi 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière (JO 23 p. 18985)

Encadrement des ventes à découvert, abaissement du seuil des offres publiques obligatoires, transparence des cessions temporaires de titres avant les assemblées, adaptation des règles de gouvernance : de nombreuses nouveautés détaillées par un praticien.

1.- La loi 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière (JO du 23 octobre p. 18984) comporte diverses dispositions articulées autour du renforcement de la supervision des acteurs et des marchés financiers, d’une part, et du soutien au financement de l’économie, d’autre part. Notre première étude avait mis en exergue le renforcement des pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers (AMF), parallèlement à celui de l’Autorité de contrôle prudentiel, qui constituait la réponse institutionnelle à la crise financière de 2008 (BRDA 21/10 inf. 26).

Sans prétendre à l’exhaustivité, la présente étude analyse les principales mesures d’encadrement des opérations de marchés, de renforcement de la transparence sur les marchés financiers, ainsi que d’amélioration de la gouvernance via des comités spécialisés. A l’examen, leur lien avec la crise financière se révèle parfois bien ténu. Sont notamment concernés l’encadrement des ventes à découvert et la réduction différée du délai de règlement-livraison, la clarification de l’action de concert et le droit des offres publiques, la réglementation des franchissements de seuils, le dispositif de lutte contre l’« empty voting » et la question des comités spécialisés (des risques, d’audit ou des rémunérations).

Sauf indication contraire, la loi est entrée en vigueur immédiatement, soit le 24 octobre 2010.

I. Encadrement de certaines opérations de marchés

Ventes à découvert et délai de règlement-livraison

2.- Sans attendre le résultat des discussions au niveau européen, le Parlement a entendu décourager autant que possible certaines pratiques de ventes à découvert de titres dont il est permis de penser qu’elles ont participé à la déstabilisation des marchés financiers. Pour ce faire, outre la dévolution de pouvoirs d’urgence au président de l’AMF (permettant d’interdire pendant une durée limitée les ventes à découvert dans des situations extrêmes ; voir BRDA 21/10 inf. 26 n° 19 s.), la loi nouvelle pose un encadrement plus strict des ventes à découvert et prévoit un raccourcissement du délai de règlement-livraison.

3.- Encadrement des ventes à découvert. En premier lieu, la loi nouvelle pose le principe d’une interdiction des ventes à découvert d’instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé, à moins que le vendeur ne dispose effectivement des titres à vendre et livrer, ou à moins qu’il n’ait pris des « assurances raisonnables » quant à la possibilité de disposer effectivement des titres au moment de leur livraison (C. mon. fin. art. L 211-17-1, I-al. 2 nouveau). Des exceptions seront toutefois prévues par décret au profit des activités de tenue de marché, afin d’éviter que ces mesures n’emportent des conséquences dommageables sur la liquidité du marché ou n’handicapent les activités de placement de la dette publique française par les établissements spécialistes en valeurs du Trésor.

Pour mémoire, lors de la réforme introduite par l’ordonnance 2005-303 du 31 mars 2005, le régime de transfert de propriété des titres financiers a été unifié et sa date reportée à la date de dénouement effectif de la transaction ou de l’opération, soit dans les trois jours de négociation suivant la négociation conformément à la pratique de Place, sauf exceptions fixées par les textes.

Dans l’objectif de limiter la pratique des ventes à découvert « nues » (sans que le vendeur ne dispose préalablement des titres vendus), le législateur a considéré qu’il convenait opportunément en premier lieu, de renforcer le caractère irrévocable de l’engagement de régler-livrer pris par les parties et ce, dès l’exécution de l’ordre et, en second lieu, de réduire le délai de règlement-livraison des titres. Techniquement, cela conduit à donner rang législatif à des dispositions jusqu’ici de nature réglementaire (Règl. gén. AMF art. 570-1 et 570-2) et à renvoyer à un décret en Conseil d’Etat pour les modalités d’application et au règlement général de l’AMF pour les dérogations à la règle de règlement-livraison en J + 3.

4.- Il a été décidé de ne pas interdire de façon permanente toutes formes de ventes à découvert, afin de préserver la liquidité du marché et le processus de formation des prix, et de préférer un encadrement de cette pratique pour garantir la livraison à bonne date des titres vendus et ce, dans des conditions de transparence renforcées.

Plus précisément, il s’agit de pallier l’ambiguïté du droit actuel (Règl. gén. AMF art. 570-1) qui ne fait pas obligation de détenir les titres financiers vendus dès l’engagement de cession (J) mais prévoit seulement un engagement de livrer ces titres contre règlement à J + 3. En pratique, le vendeur à découvert emprunte généralement les titres vendus entre J et J + 3, s’acquitte de son obligation de livraison et rachète sur le marché la quantité équivalente afin de rembourser son prêteur. Pour autant, dès lors que le vendeur est en mesure de livrer les titres à la date prévue, rien ne lui interdit de les céder sans préalablement les détenir ou les emprunter. D’où l’idée d’exiger que le vendeur s’engage vis-à-vis de son intermédiaire financier à être en mesure de livrer les titres en J + 3. En effet, ce qui importe en définitive, ce n’est pas tant la détention préalable des titres que l’assurance que la livraison aura bien lieu à la date convenue. Ne devraient alors être sanctionnées que les ventes nues pour lesquelles le vendeur n’a ni la provision en J ni les titres pour les livrer en J + 3 et si cette impossibilité résulte d’une négligence ou de la violation de l’engagement contracté lors de la transaction.

5.- En complément de la portée de cet engagement, le rôle de l’intermédiaire en charge de l’exécution de la transaction est réaffirmé. Disposant de la faculté « d’exiger, lors de la réception de l’ordre ou dès son exécution, la constitution dans ses livres, à titre de couverture, d’une provision en espèces en cas d’achat, en instruments financiers objets de la vente en cas de vente » (C. mon. fin. art. L 211-17-1, I-al. 4 nouveau), il demeure l’artisan de la limitation de la vente à découvert à hauteur de la couverture constituée.

Ce dispositif, connu de la pratique sous la dénomination de « locate rule », offre la perspective d’une harmonisation prochaine : déjà mis en œuvre aux Etats-Unis depuis fin 2008, il est envisagé dans la proposition de règlement européen sur l’encadrement des ventes à découvert et les CDS, présentée par la Commission européenne le 15 septembre 2010.

6.- Le pouvoir de sanction de l’AMF a été renforcé pour viser expressément l’intermédiaire qui « exécute une opération ayant pour objet ou pour effet » de constituer une défaillance au règlement ou à la livraison des titres. La défaillance visée pourra ainsi procéder de situations objectives dues à la négligence, ou de comportements intentionnels de non-respect de l’obligation contractée (C. mon. fin. art. L 211-17-1, III nouveau).

7.- Si en raison des aléas susceptibles de déjouer les prévisions a priori réalisables du donneur d’ordres, un dépassement du délai de livraison peut exceptionnellement ne pas être constitutif d’un manquement sanctionnable, il en va autrement dans le cas où le donneur d’ordres a pris des positions vendeuses sans disposer des « assurances raisonnables » de pouvoir procéder en temps voulu à la livraison des instruments financiers correspondants, notamment par le recours à des emprunts de titres. Paradoxalement, la notion d’« assurances raisonnables » n’est pas singulière en droit financier français.

Comme l’a fait remarquer le rapporteur Ph. Marini, elle existe en matière d’audit de comptes. Mais surtout, elle était déjà utilisée par la commission des sanctions de l’AMF comme référentiel (CA Paris 10-11-2009 n° 09-2040, ch. 5-7, confirmant la décision AMF du 13-11-2008, stés Avendis Capital SA, Accent Tonique BV et Accent Grave BV) et intégrait l’hypothèse dans laquelle le vendeur dispose d’un accord cadre avec un prêteur de titres.

Par cohérence avec l’article L 211-17 du Code monétaire et financier qui ne distingue pas selon que la négociation est intervenue sur le marché ou hors marché, la loi ne reprend pas la distinction contenue dans le règlement général de l’AMF auquel il appartiendra de continuer de déterminer les exceptions au principe (par exemple, sur un système de règlement-livraison en continu, les cessions hors d’un marché ou les négociations assimilées à une cession hors marché).

8.- Réduction du délai de règlement-livraison. Autre mesure participant de l’encadrement des ventes à découvert, ici afin d’en décourager l’utilisation, le délai de règlement-livraison est réduit de J + 3 à J + 2. L’entrée en vigueur de ce nouveau délai est néanmoins subordonnée à celle « d’un dispositif d’harmonisation équivalant au niveau européen » (C. mon. fin. art. L 211-17-1, II-al. 4).

Initialement envisagée avec davantage d’ampleur (J + 1), cette réduction s’est heurtée à plusieurs obstacles dirimants. Outre la nécessité de revoir l’ensemble des procédures de la chaîne du post-marché, le risque de défaillances en cascade frappant les acquéreurs placés dans l’impossibilité de revendre des actions non livrées a été jugé trop élevé. De même, la portée limitée de la mesure au regard de la pratique répandue des ventes à l’intérieur d’une même journée et l’absence actuelle d’harmonisation européenne rendaient la réduction à J + 1 contreproductive.

La préoccupation concurrentielle explique les choix des délais finalement retenus, tout autant que celui de décourager les ventes à découvert nues. Ainsi, aux termes de la loi nouvelle, la pratique des ventes à découvert nues n’est-elle pas par principe ou de façon systématique proscrite.

Rachat des titres de créance

9.- La loi nouvelle complète l’article L 213-1 A du Code monétaire et financier pour permettre aux émetteurs de racheter sans les annuler les titres de créances négociables (TCN) et les titres de créance ne donnant pas accès au capital admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation organisé (Alternext), qu’ils ont émis.

Cette mesure technique s’inscrit dans le projet de création en France d’un marché obligataire secondaire qui offrira liquidité et transparence. L’émetteur participera à l’animation du marché par la technique du rachat-conservation avant remise ultérieure en circulation des titres.

L’autorisation est donnée non seulement par dérogation à l’article L 228-74 du Code de commerce (« Les obligations rachetées par la société émettrice (…) sont annulées »), mais aussi par dérogation à l’article 1300 du Code civil (« Lorsque les qualités de créancier et de débiteur se réunissent dans la même personne, il se fait une confusion de droit qui éteint les deux créances »).

Outre sa finalité d’animation du marché secondaire assignée par la loi, cette faculté de rachat sans annulation est subordonnée à certaines limites complémentaires. Pour les titres de créance ne donnant pas accès au capital :

  • un émetteur ne peut détenir plus de 15 % d’une même émission, ce afin que l’animation ne confine pas à la manipulation du cours ;
  • pendant le temps de leur conservation par l’émetteur, tous les droits attachés aux titres de créance ne donnant pas accès au capital sont suspendus ; devraient notamment être concernés la participation à la masse des obligataires, le droit de vote aux assemblées générales d’obligataires ou le droit à percevoir les intérêts ;
  • une durée maximale de détention sera fixée par décret.

Les conditions de la publicité des opérations de rachat seront précisées par le règlement général de l’AMF.

Pour les TCN, un décret déterminera les conditions dans lesquelles l’émetteur pourra racheter ceux qu’il a émis et devra en informer la Banque de France.

« Clarification » de la notion de concert

10.- A l’initiative du Gouvernement, la définition de l’action de concert prévue à l’article L 233-10 du Code de commerce a été complétée dans son second critère – celui de la finalité – pour faire référence à la volonté de prise de contrôle de la société cible, caractérisant un concert dit « offensif ». Désormais « sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d’acquérir, de céder ou d’exercer des droits de vote, pour mettre en œuvre une politique commune vis-à-vis de la société ou pour obtenir le contrôle de cette société ». Les définitions du concert offensif et du concert défensif en période d’offre prévues à l’article L 233-10-1 du Code de commerce ne sont en revanche pas modifiées.

Le but du comportement des concertistes antérieurement caractérisé par la notion de « politique commune » mise en facteur commun est ainsi scindé en deux critères alternatifs : la mise en œuvre d’une politique commune vis-à-vis de la société, d’une part ; la recherche du contrôle de cette société, d’autre part.

11.- En outre, l’adjectif « commune » (« pour mettre en œuvre une politique commune »), qui avait accidentellement disparu suite à la publication de la loi Murcef 2001-1168 au Journal officiel, est réintroduit, ce que chacun approuvera même si les enjeux pratiques étaient faibles.

Pour le reste, la « clarification » de la notion de concert voulue par le législateur laisse perplexe quant au résultat atteint. La notion de « politique commune » a été précisée et enrichie non sans mal au fil des décisions de l’AMF et du contrôle de la cour d’appel de Paris : elle inclut sans ambiguïté aujourd’hui la recherche du contrôle de la cible par le ou les concertistes (CA Paris 2-4-2008 n° 07-11675 : BRDA 7/08 inf. 8, aff. « Sacyr/Eiffage »). L’introduction de la référence au contrôle n’apparaît donc pas décisive à cet égard. En outre la « politique commune », on le sait depuis l’affaire « Gécina », est entendue de façon extensive par la jurisprudence pour laquelle l’action de concert ne nécessite pas que les parties aient entendu se projeter dans l’avenir de la société elle-même (Cass. com. 27-10-2009 n° 08-18.819 : BRDA 21/09 inf. 23 ; Bull. Joly Bourse 2010 p. 26 obs. B. Zabala). Il suffit que celles-ci aient eu pour objectif à court terme un comportement commun à l’égard de la cible. La politique commune des concertistes, c’est-à-dire la communauté d’objectifs requise par le législateur, n’est pas réductible à la politique sociale. Elle peut même se situer hors de cet objet et viser la seule stratégie des concertistes eux-mêmes. En conséquence, la volonté de prise de contrôle constitue déjà l’une des formes de la politique commune et non une alternative à celle-ci comme le prévoit la lettre du texte.

Reste l’argument de la conformité textuelle à la définition communautaire de l’action de concert (Directive « OPA » du 21-4-2004 art. 2.1-d) qui plaide en apparence en faveur de la précision apportée par la loi nouvelle. Cet article 2 qui définit le concert offensif et le concert défensif en période d’offre (agissent de concert « les personnes physiques ou morales qui coopèrent avec l’offrant ou la société visée sur la base d’un accord, formel ou tacite, oral ou écrit, visant à obtenir le contrôle de la société visée ou à faire échouer l’offre ») a été transposé à l’article L 233-10-1 du Code de commerce. Il eut été plus opératoire, comme l’avait proposé le rapporteur Ph. Marini, de laisser inchangée la définition générale de l’article L 233-10 du Code de commerce et d’améliorer la rédaction de l’article L 233-10-1 du même Code par la généralisation du champ d’application de ce dernier et donc de celui du concert offensif.

Aussi cette nouvelle rédaction ne marque-t-elle pas de progrès substantiel pour ce qui est de l’élément intentionnel de l’action de concert. A la réflexion, elle pourrait même introduire une complexité non souhaitable voire une insécurité juridique dans le périmètre résiduel de la « politique commune » et risquer de constituer une régression temporaire dans la maîtrise de la notion. Bien que le ministre de l’Economie ait indiqué lors des débats que l’amendement du Gouvernement venait « préciser le droit actuel, sans en modifier la substance », il n’en demeure pas moins que la lettre et l’esprit de la loi ne se rejoignent toujours pas.

Modernisation du droit des offres publiques

12.- L’entrée en vigueur de l’ensemble des dispositions relatives aux offres publiques interviendra le 1er février 2011.

13.- Abaissement du seuil d’offre publique obligatoire. Depuis l’introduction du mécanisme d’offre publique par la loi du 2 août 1989, le seuil d’offre publique obligatoire était fixé au tiers du capital ou des droits de vote correspondant à la minorité de blocage en assemblée générale extraordinaire. Suggérée par le groupe de travail animé par B. Field sur les déclarations de franchissement de seuils de participation et les déclarations d’intention (AMF – oct. 2008 ; recommandation n° 19), la proposition de rapprocher le seuil de déclenchement de l’OPA obligatoire du contrôle de fait, pris en son acception quantitative et objective (calcul en pourcentage), a majoritairement convaincu. Elle tente de répondre au constat de situations de dispersion du capital combinées à des taux d’abstention en assemblée générale à des niveaux encore significatifs et accentuées par le mode de calcul des droits de vote imposé par la « directive transparence » (droits de vote théoriques incluant les droits de vote qui ne peuvent être exercés). Seul le seuil pertinent a véritablement été sujet à débat, oscillant entre volonté d’harmonisation européenne de fait (en faveur du seuil de 30 %) et examen de situations particulières (en faveur du seuil de 25 %).

   On observera que les limites de la démarche sont toutefois évidentes : rien n’est parfois plus variable d’une société à une autre, voire d’une année sur l’autre au sein d’une même société, que le contrôle en assemblée générale alors que le seuil du tiers correspond à une minorité de blocage quel que soit le taux d’abstention en assemblée. L’argument que nous avons, avec d’autres, soutenu ne nous paraît toutefois pas suffisant pour remettre en cause la pertinence d’une démarche d’adaptation d’une règle commune à la réalité des comportements actionnariaux en Europe. De la même façon, l’abaissement à 30 % ou même à 25 % ne serait pas de nature à contrer les pratiques de certains investisseurs activistes. En tout état de cause, la casuistique des situations particulières ne saurait condamner l’orientation prise par la loi nouvelle qui mérite d’être approuvée.

14.- Le seuil de déclenchement est désormais fixé par la loi (et non plus par le règlement général de l’AMF) à l’article L 433-3 du Code monétaire et financier dans ses deux modalités :

  • d’une part, le seuil de déclenchement « classique » est abaissé du tiers à 30 % du capital ou des droits de vote ;
  • d’autre part, par cohérence, le seuil de déclenchement par excès de vitesse d’acquisition (augmentation de 2 % par année glissante) est fixé à compter d’une détention comprise entre 30 % (et non plus le tiers) et 50 % du capital ou des droits de vote.

Le seuil de 30 % est également substitué au seuil du tiers s’agissant du cas d’offre obligatoire par franchissement indirect prévu à l’article L 433-3, IV du Code monétaire et financier (prise de contrôle d’une société cotée détenant plus de 30 % du capital ou des droits de vote d’une société cotée et qui constitue un actif essentiel de la société détentrice).

15.- Dans un même souci de coordination, il est créé un nouveau cas de franchissement de seuils soumis à déclaration au titre de l’article L 233-7 du Code de commerce fixé à 30 % du capital ou des droits de vote. Ce seuil s’ajoute au seuil du tiers qui conserve sa pertinence dans une logique de simple transparence.

16.- Modification du périmètre de calcul du seuil des offres publiques obligatoires. Cette modification avait constitué l’une des préconisations majeures du rapport « Field » (précité n° 13 ; recommandation n° 17) relayée par la consultation de Place de 2009. Elle poursuit l’objectif général mais certain de protection des minoritaires face au développement de nouvelles modalités d’emprise sur les sociétés par le recours à des instruments financiers complexes. Ainsi s’est développée l’idée d’un rapprochement du périmètre de calcul du seuil d’OPA obligatoire avec les nouvelles modalités de calcul des franchissements de seuils légaux issues de l’ordonnance 2009-105 du 30 janvier 2009. A une détention « en dur » ou effective (actions détenues directement ou indirectement, seul ou de concert), il était envisagé d’ajouter la détention potentielle lorsqu’elle est à la seule main du détenteur, quitte à instaurer de nouvelles dérogations pour les cas d’absence de volonté de prise du contrôle.

L’intensité de l’alignement a divisé et continuera de diviser la Place, au-delà de la solution retenue par le législateur. La loi nouvelle retient ainsi un alignement total du périmètre pris en compte pour le déclenchement d’une offre publique obligatoire sur le périmètre retenu en matière de franchissement de seuils. Le choix d’un alignement total a l’attrait de la cohérence, de la lisibilité et de la simplicité. Il a pour effet de faire entrer dans le périmètre les actions des contrats optionnels et instruments financiers dérivés donnant accès à des actions existantes à la seule initiative du porteur (options inconditionnelles, contrats à terme et obligations échangeables en actions) prévues à l’article L 233-9, I-4° du Code de commerce. En outre, compétence est donnée au règlement général de l’AMF pour préciser la liste des accords ou des instruments financiers de l’article L 233-9, I-4° du Code de commerce qui devront être pris en compte.

Une évolution plus modérée était défendue par le Gouvernement et majoritairement par les représentants des émetteurs, partisans de la conservation du périmètre antérieur, tout en précisant ce seuil dans la loi et en y intégrant une partie des cas d’assimilation de l’article L 233-9 du Code de commerce (actions possédées par les sociétés contrôlées ou par un tiers concertiste ; procurations sans instructions de vote). Plusieurs arguments légitimes étaient avancés. Un argument de cohérence et de logique tout d’abord, l’OPA obligatoire ressortissant à la logique du contrôle effectif à une date donnée (argument de la propriété), les franchissements de seuils relevant quant à eux de la logique de la transparence et de l’information. On objectera que ces deux dispositifs, si distincts soient-ils, n’en sont pas pour autant déconnectés l’un de l’autre voire complémentaires poursuivant la finalité commune de protection des actionnaires contre des prises de contrôle rampantes. Ensuite avancé, l’argument de la conformité à la directive OPA 2004/25 du 21 avril 2004 (considérant 11 et art. 5.1) visant la personne qui « détient » des titres procède d’une analyse littérale qui convainc davantage. Il n’est pas douteux que le dispositif communautaire ou national, raisonnant en termes de capacité d’influence politique, traite de la capacité à disposer de droits de vote – immédiatement, dans la lettre et potentiellement à l’initiative du détenteur, dans l’esprit. Enfin, la nécessité de procéder à une extension des cas de dérogations a été invoquée par certains comme une source de discussions avec l’AMF et en conséquence d’insécurité juridique. Mais il peut cependant être observé que le système actuel, fondé également sur des cas de dérogations, fonctionne bien.

Plus généralement, le niveau de transparence établi par la dernière réforme du régime des franchissements de seuils en 2009 était jugé suffisant par son caractère annonciateur des évolutions prévisibles de la détention des droits de vote et, par voie de conséquence, de la répartition des pouvoirs. Pour autant, avant même cette réforme, l’on savait que des instruments financiers à l’origine dénués de toute perspective d’accès aux droits de vote pouvaient finalement donner lieu à dénouement en actions (des contrats avec paiement d’un différentiel (CFD) ou des contrats financiers d’échange sur actions (equity swaps), par avenant ultime du contrat, voire par simple rachat des titres auprès des banques). La transparence comme moyen de régulation démontre en réalité ses limites et ne permet pas de prévenir une prise de contrôle remettant ainsi en cause la pertinence du statu quo. La visibilité sur la certitude de la détention et, corrélativement, de l’exercice des droits de vote demeure encore insuffisante au regard de la finalité du dispositif.

Le Sénat n’a pas retenu la solution du statu quo qu’il a jugée par trop statique et restrictive et lui a préféré la vision dynamique d’un alignement du périmètre du seuil de déclenchement des offres obligatoires sur celui du régime des franchissements de seuils.

17.- Des dispositions transitoires s’imposaient. Pour l’application du nouveau seuil de 30 %, il est prévu que, pour les personnes détenant au 1er janvier 2010, directement ou indirectement entre 30 et 33,33 % du capital ou des droits de vote, le seuil de 33,33 % restera applicable pour le déclenchement d’une offre publique « tant que leur participation restera comprise entre ces deux seuils et dans les conditions fixées par le règlement général de l’AMF ».

Si les praticiens tablaient plutôt sur une prise en compte des participations à la date d’entrée en vigueur du texte, l’amendement sénatorial adopté a retenu celle d’une date suivant de peu la date du dépôt du projet initial sur le bureau de l’Assemblée nationale. Sans doute a-t-on voulu éviter un effet d’aubaine pour ceux qui auraient été tentés de porter leur participation juste au-dessus de 30 % dans les mois précédant l’adoption définitive du texte.

18.- Modification des modalités de calcul du prix de l’offre publique obligatoire. La règle de calcul du prix en matière d’offre obligatoire a été redéfinie (C. mon. fin. art. L 433-3, I-al. 2). Jusqu’à présent, le prix offert devait être au moins équivalent au prix le plus élevé payé par l’initiateur dans les douze mois précédant le dépôt de l’offre. Considérant qu’un temps non négligeable pouvait s’écouler entre le fait générateur de l’offre publique et le dépôt effectif du projet d’offre auprès des services de l’AMF – situation vérifiée dans l’affaire « Gecina » en 2009 –, le point de départ du délai a été déplacé à la date du fait générateur de l’offre obligatoire. Des opérations d’acquisition réalisées à des prix supérieurs devraient ainsi moins risquer d’échapper à la période de référence déterminant le prix plancher.

Par ailleurs, le terme « égal » qualifiant le prix minimal a été substitué à celui d’ « équivalent » pour une meilleure conformité à la lettre de la directive OPA (Directive 2004/25 du 21-4-2004 art. 5).

Mesures diverses

19.- Suppression de la garantie de cours. La procédure de garantie de cours a vécu et le législateur a procédé à sa suppression – à compter du 1er février 2011 – tant sur le marché réglementé que sur les marchés non réglementés (C. mon. fin. art. L 433-3, II et III anciens). Frappée d’obsolescence et souvent de redondance avec l’offre publique obligatoire sur le marché réglementé français, délaissée par la pratique et par le régulateur qui opérait fréquemment une requalification de l’opération en offre publique d’acquisition simplifiée (Règl. gén. AMF art. 235-3), sa disparition était annoncée.

Un même constat de désuétude pouvait être fait sur le marché Alternext, aggravé par l’incapacité du dispositif à assurer la protection des minoritaires dans des occurrences comparables (prise de contrôle indirecte via une holding, franchissement du seuil de 50 % par une augmentation de capital réservée, acquisition de droits de vote double : cf. Rapport AMF sur Alternext du 6-10-2008) en raison d’un champ d’application restreint. Dans l’objectif de lui substituer le régime d’offre publique obligatoire sur Alternext, une base législative nouvelle est créée rendant la procédure d’offre publique obligatoire applicable sur les marchés non réglementés d’un Etat de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen, à la demande de l’entreprise de marché gestionnaire (C. mon. fin. art. L 433-3, II nouveau). Le règlement général de l’AMF qui précisera les modalités et conditions du dispositif devra préserver l’attractivité d’Alternext et fixer des cas de dérogations adaptés. Du maintien de la spécificité d’Alternext dépendra le développement futur de ce jeune marché financier dont on peut regretter que les réformes successives récentes le rapprochent inexorablement du marché réglementé français.

20.- Introduction d’une procédure d’offre publique de retrait et de de retrait obligatoire sur Alternext. Répondant aux vœux de la Place (Rapport AMF sur Alternext octobre 2008 approuvé par la consultation publique de la DGTPE), la loi nouvelle étend aux marchés non réglementés (donc potentiellement à Alternext) la procédure d’offre publique de retrait (C. mon. fin. art. L 433-4, V nouveau) et de retrait obligatoire, soit à l’issue d’une offre publique de retrait, soit à l’issue d’une offre publique. Même si elle rapproche un peu plus encore Alternext des caractéristiques du marché réglementé Euronext Paris, cette évolution était souhaitée tant par l’entreprise de marché que par les investisseurs. Elle entrera en vigueur le 1er février 2011.

21.- Limitation du champ de l’offre publique de retrait sur demande de l’AMF. Le fondement légal des offres publiques de retrait consécutives à une fusion (C. mon. fin. art. L 433-4, I-3°) sera restreint, à compter du 1er février 2011, aux fusions-absorptions d’une ou plusieurs sociétés filles par leur société mère ou à une fusion intragroupe entre sociétés sœurs (« fusion de cette société avec la société qui la contrôle ou avec une autre société contrôlée par celle-ci »). Le droit commun des articles L 236-1 à L 236-24 du Code de commerce devrait assurer une protection adéquate des minoritaires pour les autres opérations de fusion.

Cette modification vient mettre fin à l’imprécision rédactionnelle de cette disposition issue de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 qui visait toute fusion entre des sociétés dès lors que l’une était cotée et contrôlée. Elle fait converger sans toutefois l’égaler le périmètre législatif vers le périmètre réglementaire (l’article 236-6 du règlement général de l’AMF étant limité au cas de fusion ou d’absorption d’une fille cotée par sa mère).

II. Amélioration de la transparence

Transparence des opérations de cession temporaire de titres en période d’assemblée générale

22.- Dans la droite ligne des restrictions apportées aux ventes à découvert nues, le législateur a renforcé la transparence sur les mouvements de titres pré-assemblées générales. L’objectif est connu : réconcilier la propriété juridique de titres financiers et l’un de ses attributs, le droit de vote, avec le risque économique ou capitalistique.

Suivant les conclusions pragmatiques du rapport de Y. Mansion sur « les opérations de prêt-emprunt de titres en période d’assemblée générale d’actionnaires » (AMF – janvier 2008) qui préconisaient des mesures de transparence à défaut d’autres moyens juridiques opératoires, la loi nouvelle introduit une obligation de déclaration des actions détenues au titre d’une ou de plusieurs opérations de cession temporaire et émises par un émetteur français dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (C. com. art. L 225-126, I nouveau). Sont ainsi implicitement visées les opérations de prêt, de pension livrée ou de vente à réméré.

Il convient de préciser que cette obligation pèse sur le cessionnaire, l’emprunteur ou celui qui aura la faculté ou l’obligation de retransférer les actions. La publication devra en revanche être assurée par l’émetteur dans des conditions définies par le règlement général de l’AMF, ce qui ne manquera pas de décevoir les émetteurs opposés à une contrainte supplémentaire qui, de surcroît, diffère de la solution retenue en matière de franchissements de seuils (publication par l’AMF).

Le détenteur, agissant seul ou de concert, est redevable, au plus tard le troisième jour ouvré à zéro heure, heure de Paris, précédant l’assemblée générale, envers l’émetteur ainsi qu’envers l’AMF d’une information normée. Ce délai est calé sur le délai d’acquisition de la qualité d’actionnaire (C. com. art. R 225-85) appelé « record date ». La loi nouvelle définit à la fois le seuil déclencheur, fixé à 0,5 % des droits de vote de l’émetteur, et le contenu de l’information (nombre d’actions acquises, identité du cédant, date et échéance du contrat et, le cas échéant, convention de vote). Les exemptions en matière de franchissement de seuils sont étendues à ce dispositif (par exemple, les actions détenues par un prestataire de services d’investissement dans son portefeuille de négociation).

23.- Les sanctions sont inspirées du régime des franchissements de seuils avec quelques spécificités, pour l’essentiel dans le sens d’un allégement (C. com. art. L 225-126, II et III nouveaux).

En cas de non-respect de cette obligation de déclaration des actions détenues au titre d’une ou de plusieurs opérations de cession temporaire, il est prévu une privation automatique des droits de vote pour les actions acquises et ce, pour toutes les assemblées qui se tiendraient jusqu’à la revente ou la restitution desdites actions.

En outre, le tribunal de commerce saisi pourra prononcer la suspension totale ou partielle, pour une durée maximale de cinq ans, des droits de vote de l’actionnaire qui n’aurait pas procédé à cette information. Il s’agit toutefois d’une saisine fermée (uniquement ouverte au représentant de l’émetteur, d’un actionnaire ou de l’AMF).

Enfin, les délibérations adoptées en assemblée générale en violation de ces dispositions pourront être annulées par un juge. Le choix d’une nullité facultative expressément prévue par la loi peut surprendre. On sait que l’article L 235-2-1 du Code de commerce permet déjà de demander en justice l’annulation des « délibérations prises en violation des dispositions régissant les droits de vote attachés aux actions ». Pour la doctrine, cet article permet l’annulation judiciaire d’une délibération votée par un actionnaire n’ayant pas accompli les déclarations de franchissement de seuils requises (en ce sens, A. Viandier, OPA OPE et autres offres publiques : éd. Francis Lefebvre 2010 no 372). Sauf alors à douter de l’application de l’article L 235-2-1 précité ou du caractère impératif de la règle, la précision du nouvel article L 225-126, II du même Code fait ici œuvre de redondance et n’allège en rien sur ce point le niveau répressif. Probablement le législateur a-t-il souhaité sécuriser le dispositif en considération des exigences de la Cour de cassation qui ne prononce la nullité de délibérations qu’au cas de disposition expresse la prévoyant (Cass. 1e civ. 17-12-2009 n° 08-12.344 : BRDA 2/10 inf. 1 ; Cass. com. 18-5-2010 n° 09-14.855 : BRDA 10/10 inf. 1 ; Cass. com. 13-7-2010 n° 09-16.156 : BRDA 15-16/10 inf. 2).

La sanction pénale de l’article L 247-2, I du Code de commerce pour défaut de déclaration de franchissement de seuils n’a pas fait l’objet d’une extension au nouveau dispositif.

Autres mesures de transparence

24.- Allégement de la publicité des droits de vote et du nombre d’actions sur Alternext. Les conditions de publicité portant sur les droits de vote et le nombre d’actions pour les sociétés cotées sur Alternext ont été modernisées et alignées sur le modèle en vigueur sur le marché réglementé (obligation de publier chaque mois le nombre total de droits de vote et le nombre d’actions composant le capital de la société s’ils ont varié par rapport à ceux publiés antérieurement). Sans préjudice de modalités complémentaires prévues par les règles de marché, ces informations pourront donc faire l’objet d’une simple mise en ligne sur le site internet de l’émetteur (C. com. art. L 233-8, II modifié) au lieu d’une publication dans un journal d’annonces légales.

25.- Simplification de l’information trimestrielle. Sur amendement de Ph. Marini, l’obligation de mentionner le montant net par branche d’activité du chiffre d’affaires de chacun des trimestres précédents de l’exercice en cours est supprimée (C. mon. fin. art. L 451-1-2, IV-3°). Il s’agit de simplifier les modalités de déclaration des chiffres d’affaires trimestriels par les sociétés cotées sur un marché réglementé en supprimant des informations qui sont déjà connues du marché.

Par exemple, dans les 45 jours suivant la fin du 3e trimestre de l’année N, sont à publier les chiffres d’affaires du 3e trimestre de N et de N – 1 et le chiffre d’affaires cumulé de N et de N – 1. Sont supprimés les chiffres d’affaires des 1er et 2e trimestres de N et de N – 1.

Cette disposition entrera en vigueur le 1er février 2011.

III. Amélioration de la gouvernance

Suivi des risques

26.- Introduites par la commission des finances de l’Assemblée nationale avant d’être finalement modifiées, les dispositions portant sur la constitution obligatoire d’un comité des risques auprès des organes délibérants des établissements bancaires et assurantiels (établissements de crédit, entreprises d’assurance et de réassurance, mutuelles et institutions de prévoyance) ont provoqué une levée de boucliers.

La tentation du législateur d’imposer, à l’instar du régime des comités d’audit (C. com. art. L 823-19), la création d’un comité distinct en charge du « suivi des risques » (ce qui heurtait la logique institutionnelle, une telle mission relevant de la direction générale) a été finalement jugée excessive.

Par principe, il appartiendra au comité d’audit d’exercer la mission nouvelle d’assurer le « suivi de la politique, des procédures et des systèmes de gestion des risques » (C. mon. fin. art. L 511-46). Ce n’est qu’au titre d’une option ouverte par le texte que le conseil d’administration ou le conseil de surveillance de l’établissement concerné pourra choisir de confier cette mission à un comité distinct fonctionnant selon le modèle du comité d’audit. Les dérogations à l’obligation de créer un comité des risques sont les mêmes que celles applicables à l’obligation de créer un comité d’audit.

Le Sénat dans sa sagesse a su, à notre avis, trouver un équilibre entre la finalité du dispositif et le souci de flexibilité, sans obérer la cohérence juridique de ce dispositif. Sagesse car il n’est pas contesté que participe d’ores et déjà de la mission du comité d’audit le « suivi de l’efficacité des systèmes de contrôle interne et de gestion des risques ». N’est pas moins contesté que ce qui importe est bien que le suivi des risques anticipe l’ensemble des risques susceptibles d’influencer la valeur comptable et financière de la société, y compris les risques de liquidité ou de marché. La crise financière de 2008 a mis en évidence ce besoin criant d’intervention préventive, sans préjudice des missions de la direction générale. L’objectif pouvait-il être atteint par un moyen moins lourd ? Probablement pas. Sagesse enfin, car certains grands établissements ont déjà doté le comité d’audit de cette mission spécifique et il sera dès lors plus aisé d’obtenir une application généralisée et effective d’un dispositif déjà éprouvé par la Place.

Ce dispositif entrera en vigueur le 1er mai 2011.

Comité d’audit

27.- A l’initiative du Sénat, deux modifications rédactionnelles ont été introduites à propos des comités d’audit. En premier lieu, l’exemption relative aux groupes de sociétés est étendue aux sociétés d’assurance (C. ass. art. L 322-3 modifié). Il s’agit notamment de permettre aux groupes d’assurance contrôlés par une entité de tête qui, non soumise à l’obligation d’instituer un comité d’audit, décide de le faire sur une base volontaire, de bénéficier de l’exemption pour les filiales qu’elle contrôle (au sens de l’article L 233-16 du Code de commerce) ou liées à l’entreprise mère (au sens de l’article L 334-2 du Code des assurances). Cette clarification bienvenue permet d’améliorer la gestion du suivi des risques au niveau pertinent, celui du groupe.

28.- En second lieu, ont été supprimés les qualificatifs « exclusive et collective » attribués à la responsabilité des membres du conseil d’administration ou du conseil de surveillance pour les actes du comité d’audit (C. com. art. L 823-19). Il s’agissait d’une demande formulée dans le rapport du groupe de travail de l’AMF sur le comité d’audit, publié le 14 juin 2010. La responsabilité civile des administrateurs du fait des agissements du comité d’audit est ainsi réintégrée dans le droit commun (C. com. art. L 225-251), à savoir la responsabilité (individuelle ou solidaire) pour faute, telle qu’elle a été récemment précisée par la Cour de cassation (Cass. com. 30-3-2010 n° 08-17.841 : BRDA 9/10 inf. 1). Le comité d’audit n’étant qu’un démembrement du conseil d’administration, ses membres ne sauraient encourir de responsabilité propre, mais seulement en qualité de membres du conseil d’administration.

Comité spécialisé en matière de rémunérations

29.- La loi nouvelle a intégré dans le Code monétaire et financier un article L 511-41-1 A selon lequel, au sein des établissements de crédit, des entreprises d’investissement et des sociétés de capital-risque, d’une taille supérieure à certains seuils qui seront fixés par décret, l’organe délibérant devra constituer, pour préparer ses décisions, un comité spécialisé en matière de rémunérations. Ce comité sera majoritairement composé de membres indépendants, compétents pour analyser les politiques et pratiques de l’entreprise en matière de rémunérations, y compris au regard de la politique de risque de l’entreprise (A rapprocher : Règlement CRBF 97-02 modifié par l’arrêté du 3-11-2009).

Ce comité procèdera à l’examen annuel des principes de la politique de rémunération de l’entreprise, des rémunérations et avantages accordés aux mandataires sociaux et de celles des salariés gérants d’OPCVM, d’OPCI ou de Sicaf et, bien entendu, des traders (« salariés, professionnels de marchés financiers, dont les rémunérations sont susceptibles d’avoir une incidence significative sur l’exposition aux risques »).

L’Autorité de contrôle prudentiel est compétente pour « examiner les politiques et pratiques de rémunération des salariés, professionnels de marchés financiers, dont les rémunérations sont susceptibles d’avoir une incidence significative sur l’exposition aux risques des entreprises assujetties, afin de contrôler leur conformité aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Elle rend compte de son activité dans ce domaine et de ses observations dans le rapport annuel (…) ».

Ce dispositif entrera en vigueur le 23 avril 2011.

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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