Cass. 1e civ. 15 décembre 2010 n° 09-10.140 (n° 1161 FS-PBI)

En cas de désaccord entre copropriétaires de parts sociales sur le choix du mandataire appelé à les représenter, l'un d'eux peut toujours demander en justice la désignation du mandataire. Et rien ne peut l'en empêcher.

Les copropriétaires de parts sociales indivises sont représentés par un mandataire unique choisi parmi eux ou en dehors d'eux pour participer aux décisions collectives.

En cas de désaccord, le mandataire est désigné en justice à la demande du copropriétaire le plus diligent (C. civ. art. 1844, al. 2) et il ne peut pas, vient de préciser la Cour de cassation, être dérogé à ces dispositions impératives.

Par suite, lorsqu'un copropriétaire est investi d'un mandat général d'administration donné à la majorité des deux tiers des droits indivis (C. civ. art. 815-3, 2°), le juge ne peut pas refuser de désigner un mandataire en application de l'article 1844, al. 2 à la demande d'un copropriétaire qui n'a pas approuvé le mandat général.

à noter

1° Cette solution, inédite, s'applique aussi aux copropriétaires d'actions indivises en raison de l'identité de rédaction entre l'article L 225-110, al. 2 du Code de commerce, relatif à leur représentation aux assemblées, et l'article 1844, al. 2 précité. Les dispositions de ce dernier texte sur la désignation en justice du mandataire en cas de désaccord étant impératives, les statuts ne peuvent pas y faire obstacle (CA Paris 7-1-2009 n° 08-14713 : BRDA 6/09 inf. 1, sol. implicite). Ils peuvent seulement, comme l'autorise l'alinéa 4 de l'article 1844, déroger aux critères de choix du mandataire par les copropriétaires (qualité et nombre de mandataires).

Ajoutons que, outre le cas de désaccord relevé en l'espèce, il y a aussi désaccord, à notre avis, en cas de refus des indivisaires de désigner un mandataire ou en cas d'impossibilité pour eux de s'entendre sur le choix de celui-ci.

2° Au cas particulier, le copropriétaire désigné à la majorité des deux tiers reprochait à la cour d'appel d'avoir affirmé que l'article 815-3, 2° ne peut pas porter atteinte au principe d'unanimité qui régit l'indivision. En jugeant ce motif surabondant, c'est-à-dire non nécessaire à la justification de l'arrêt d'appel, la Cour suprême ne se prononce pas sur la question.

A notre avis, ni ce principe, ni l'article 1844, qui ne comporte aucune disposition spéciale sur les conditions de désignation du mandataire, n'interdit que ce dernier soit désigné à la majorité des deux tiers. Mais un tel mandataire, seulement investi d'un mandat général d'administration, ne peut pas représenter les copropriétaires pour toutes les décisions : il ne peut agir que pour celles entrant dans le cadre de son mandat, c'est-à-dire celles qui relèvent de l'exploitation normale des biens indivis. Il ne peut donc pas les représenter valablement pour voter, par exemple, une décision impliquant un acte de disposition (réduction de capital, dissolution de la société, scission, etc.).

Auteur : Editions Francis Lefebvre

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